mélange
tu sais quoi ? tu vas prendre une pioche et percer à grands coups cette immense toile blanche. tu vas en déchirer le tissu, tu vas saloper sa couleur immaculée et tu vas même aimer ça. tu vas t'arracher à arracher ce qui se trouve derrière, ou peut-être à l'intérieur de ce grand vide blanc, même pas noir, il est blanc, il n'est pas une absence, mais ici tout est inversé.
mais ici tout est plus lent.
mais là-bas tout est un peu plus rapide, mais puisque tout va plus vite que la lumière, on va réussir à en recapter des rayons, on va se faire mal au poignet, et tu vas souffrir pour moi.
parce que je fuis la souffrance comme une bête affamée, parce que je tue la souffrance à coup d'ennui comme à coup d'euphorie, parce que je gueule plus fort que la souffrance quand il le faut, je crie et je me bouche les oreilles et je secoue la tête de toutes mes forces, parce que je sais que la souffrance finira bien par me percer les tympans un jour ou l'autre. c'est innévitable et un jour je ne courirai plus aussi vite qu'elle.
alors je prends la pioche et je frappe en criant, parce qu'il y avait sans l'ombre d'un doute un silence de plus en plus pesant dans la pièce, parce que j'en devenais aveugle, parce que les murs étaient blancs.
et parce que tout était blanc.
et que je déteste le blanc.
et parce que tout ceci n'est encore rien qu'une histoire de porte-fenêtre qui s'ouvre et qui se ferme. et de casserole, et il n'y a que moi qui suis. et qu'inconsciemment je transforme cela en ceci, juste parce que j'ai pensé qu'il faudrait faire un mélange, ce soir.
parce que la pioche, ça épuise.
et que finalement c'est peut-être moins spectaculaire que ça.